François Bernier nous parle d’un procédé utilisé par les Moghols pour se débarrasser des princes présentant un danger pour l’empereur.
Aurangzeb avait profité de la maladie de son père, l’empereur Shah Jahan pour prendre le pouvoir. Il avait fait décapiter Dara, son frère aîné, et emprisonné Murad Bakhsh qui devait être ensuite exécuté sans procès suite à une accusation de meurtre. (le troisième frère, Sultan Shuja, s’était enfui dans le royaume d’Arakan). Un des fils de Dara, Sipihr Shikoh, était lui aussi à Gwalior, quand l’autre fils, Suleiman Shikoh, le dernier opposant au sacre d’Aurangzeb, venait d’être arrêté. Celui-ci pria alors son oncle de le faire mourir plutôt que de lui faire boire le poust. Bernier nous explique ce que c’est :
« Ce poust n’est autre chose que du pavot écrasé qu’on laisse la nuit tremper dans de l’eau ; c’est ce qu’on fait ordinairement boire à Gwalior à ces princes auxquels on ne veut pas faire couper la tête ; c’est la première chose qu’on leur porte le matin et on ne leur donne point à manger qu’ils n’en aient bu une grande tasse, on les laisserait plutôt mourir de faim ; cela les fait devenir maigres et mourir insensiblement, perdant peu à peu les forces et l’entendement, et devenant comme tout endormis et étourdis, et c’est par là qu’on dit qu’on s’est défait de Sipihr Shikoh, du petit fils de Murad Bakhsh et de Suleiman Shikoh lui-même. »
Source :
• François Bernier, Un libertin dans l’Inde moghole – Les voyages de François Bernier (1656-1669), Histoire de la dernière révolution des états du Grand Moghol pp. 125-126