Alors que la pratique du purdah était répandue, Français Bernier qui traversait l’Inde au XVIIe siècle avait usé d’astuce pour avoir la possibilité d’apprécier la beauté des femmes du pays :
« Les Cachemiris sont encore renommés pour le beau sang ; ils sont aussi bien faits que nos Européens, ne tenant même rien du visage de Tartare avec ce nez écaché et ces petits yeux de porc, comme l’ont ceux de Kachgar et la plupart de ceux du Grand Tibet. Les femmes surtout y sont très belles ; aussi est-ce là que s’en fournissent la plupart des étrangers nouveaux venus à la cour du Mogol, afin de pouvoir faire des enfants qui soient plus blancs que les Indiens et qui puissent ainsi passer pour de vrais Mogols ; et certainement, si l’on peut juger de la beauté des femmes qui sont plus cachées et retirées par celles du menu peuple qu’on rencontre dans les rues et qu’on voit dans les boutiques, on doit croire qu’il y en a de très belles. À Lahore, où elles sont en renom d’être de belle taille, menues de corps et les plus belles brunes des Indes, comme elles le sont effectivement, je me servis d’un artifice ordinaire aux Mogols qui est de suivre quelque éléphant, principalement de ceux qui sont richement enharnachés, car aussitôt qu’elles entendent ces deux sonnettes d’argent qui leur pendent des deux côtés, elles mettent toutes la tête aux fenêtres. Je me servis ici du même artifice et d’un autre encore qui m’a bien mieux réussi. Il était de l’invention d’un vieux et fameux maître d’école que j’avais pris pour m’aider à entendre un poète persan. Il me fit acheter quantité de confitures et, comme il était connu et qu’il avait l’entrée partout, il me mena en plus de quinze maisons, disant que j’étais son parent nouveau venu de Perse, que j’étais riche et à marier. Aussitôt que nous entrions dans une maison, il distribuait des confitures aux enfants et incontinent tout accourait autour de nous, femmes et filles, grandes et petites, pour en attraper leur part ou pour se faire voir. Cette folle curiosité ne laissa pas de me coûter quelques bonnes roupies, mais aussi je ne doutai plus que dans Cachemire il n’y eût d’aussi beaux visages qu’en aucun lieu de l’Europe. »
Source :
• François Bernier, Un libertin dans l’Indes moghole – Les voyages de François Bernier (1656-1669), Voyage au Cachemire pp. 412-413